« ואבא היום אל העין«
« Je suis venu aujourd’hui vers la fontaine.» (בראשית כד, מב)
Rachi explique dans son commentaire, que nous déduisons du mot « aujourd’hui » qu’Eliezer est arrivé à Na’hor (Irak) le jour même de son départ de ‘Hébron. De là, nous apprenons que la terre s’est rétractée pour lui.
Le Midrach ajoute, qu’au lieu des 17 jours de trajet en chameau de Kyriat Arba à ‘Haran, le voyage n’aura duré que trois heures. (ילקוט שמעוני)
Commençons notre réflexion par les paroles des Sages qui nous enseignent dans le Midrach : « D.ieu a appelé la terre : ארץ = « erets« .Et pourquoi a-t-Il appelé la terre par ce nom ארץ ? Car la terre a voulu faire « la volonté » = רצא de son Créateur ; le mot ארץ = terre est composé des mêmes lettres que le mot רצא = « voulut« . (בראשית רבה ה, ה)
Il est également écrit dans le Talmud: « toutes les créatures de la Création ont été créées, avec leur forme et leur taille, avec leur consentement. » (חולין ס:) – Rachi explique que D.ieu a consulté toutes les créatures pour savoir si elles acceptaient les formes et les mesures choisies pour chacune d’entre elles et toutes ont accepté.
S’il en est ainsi, pourquoi la terre = ארץ a-t-elle reçu le mérite de recevoir comme nom le titre de ארץ venant témoigner de sa volonté = רצאd’accepter de réaliser la volonté Divine ? Pourtant, chaque élément de la Création a également accepté ce que D.ieu a choisi pour lui, pourquoi alors n’ont-ils pas également mérité ce nom?
L’auteur du livre « ערוגות הבושם » écrit que lorsqu’Hachem est venu vers la terre, Il l’a installée au niveau le plus bas de toute la Création, au niveau le plus matériel, là où le penchant au mal dominerait. Elle constitue l’endroit où l’homme pose son pied pour abandonner les voies de l’Eternel et fauter, l’endroit où la face de la Présence Divine est le plus grandement cachée.
La terre aurait pu argumenter devant l’Eternel qu’elle n’était pas d’accord d’avoir été créée avec ces conditions matérielles-là, d’être tellement éloignée du Créateur. Elle aurait pu demander à être créée avec un niveau spirituel supérieur, comme les Cieux dont l’opacité matérielle est beaucoup plus légère et qui, par conséquent, sont beaucoup plus proches de D.ieu.
Cependant, la terre n’a pas réagi comme cela. Au contraire, elle a marqué son plein accord d’être créée, selon la volonté du Créateur. En intellectualisant la situation, elle a réussi à atteindre la compréhension que chaque création remplit un rôle précis et unique. C’est pour cette raison que chaque créature créée doit accomplir et faire la volonté de l’Eternel, selon son origine et par rapport à ce qu’elle est dans son essence. C’est ainsi qu’elle mérita le titre unique de ארץ = « terre » car elle a « voulu« = רצא faire la volonté du Créateur, malgré que son niveau soit le plus bas de toute la Création.
Pour nous, êtres humains, qui avons été modelés et façonnés à l’origine par la terre, nous devons apprendre cette valeur sublime et très élevée enseignée par cette dernière qui accepta pleinement d’avoir été créée selon la volonté du Créateur.
Le mauvais penchant nous met à l’épreuve, en essayant de nous égarer et de nous persuader que nous pourrions servir l’Eternel beaucoup mieux, si nous étions différents, si nous avions la richesse, l’intelligence, la beauté ou les honneurs. En réalité, il ne cherche, à travers ces leurres, qu’à prendre le contrôle de nos vies et nous placer dans une dynamique illusoire, au détriment d’un authentique service du Créateur. Il nous appartient de le contrer et de l’affronter afin de servir Hachem, comme il convient.
C’est également ce que le roi David dit dans les Psaumes : « J’ai le regard tourné vers les hommes loyaux du pays, pour les faire demeurer avec Moi ; celui qui suit le droit chemin, Je l’attacherai à Mon service.» (תהילים קא, ו). Hachem aime ces hommes qui ont « la foi de la terre », qui apprennent de la terre, à se remplir de volonté dans leur mission donnée par l’Eternel, et ceci par la voie de la simplicité et de l’intégrité, avec foi et sans aucun calcul, ni aucune astuce.
Au sujet de ce service divin exceptionnel, il est écrit dans le livre « ערוגות הבושם » : « nous voyons chez le fidèle serviteur d’Avraham, Eliezer, qu’il avait une fille ; toute sa vie durant, il a attendu dans l’espoir de trouver la possibilité de pouvoir unir sa fille à Its’hak, le fils d’Avraham.
Même lorsqu’Avraham envoya Eliezer chercher une femme pour Its’hak, il avait encore l’espoir qu’éventuellement, il pourrait avoir le mérite de s’unir avec la famille d’Avraham, son maître.
Comme le dit Rachi sur les paroles d’Eliezer « peut-être (= אלי), ne me suivra-t-elle pas. » Il est écrit אלי au lieu de אולי, la lettre ו est manquante, ce qui veut dire « vers moi » = אלי.
L’intention d’Eliezer était de faire une proposition à Avraham: marier Its’hak à sa fille. Avraham lui répondit: « Mon fils est béni et tu es maudit ; le maudit ne s’unit pas avec le béni.»
Il serait logique que de telles paroles altèrent la relation entre Avraham et Eliezer, son fidèle serviteur, car les paroles d’Avraham lui ont révélé que tous les efforts menés toute sa vie en vue d’avoir le mérite d’unir sa fille avec Its’hak étaient vains.
Cependant, Eliezer montre toute sa grandeur et ne s’emporte pas ; il ne se laisse pas refroidir par le mauvais penchant et le contre afin d’accomplir son service dans ce monde ici-bas. Bien au contraire, il s’empresse même, de façon merveilleuse, de réaliser la volonté de son maître Avraham : il part à la recherche d’une épouse pour Its’hak.
À présent, le commentaire de Rachi sur ce verset est doux comme le miel: « je suis venu aujourd’hui vers la fontaine.» En effet, il dit : « aujourd’hui, je suis parti, aujourd’hui, je suis arrivé ; de là, nous apprenons que la terre s’est rétrécie miraculeusement pour lui ».
Dans la grandeur de son empressement à accomplir sa mission pour Avraham, Eliezer a mérité la contraction de la terre, ce qui a écourté son chemin qui ne fut que de trois heures au lieu de dix-huit jours. Comme nous le rapporte le Talmud : « celui qui vient se purifier reçoit une aide providentielle. » (שבת קד.)
D’où Eliezer tire-t-il cette grandeur exceptionnelle ?
Eliezer l’appris de la terre. Bien qu’elle hérita de la part la plus basse de toute la Création, elle mérita de recevoir le titre honorifique de ארץ, témoignant ainsi de sa grandeur lorsqu’elle accepta avec ferveur רצא ce que D.ieu avait décidé pour elle. Bien qu’elle se retrouva fort éloignée de D.ieu, elle servit son Créateur avec dévotion. Ainsi se comporta Eliezer qui fit de même et accepta sa destinée de tout son cœur.
Que nous puissions, nous aussi, apprendre de la terre et accomplir le service Divin avec ce que D.ieu nous a donné et avoir une foi complète, dans notre cœur, que tout ce que fait l’Eternel miséricordieux est pour le bien. Que nous ayons reçu ou non la sagesse, que nous soyons beaux ou non, riches ou pauvres, que nous connaissions ou non la réussite, dans tous les cas nous devons servir pleinement notre Créateur tels que nous sommes et avec les moyens qu’Il nous a donné. Et surtout apprendre de la terre – qui a été créée par la volonté de D.ieu – à accepter de Le servir avec foi et en toute simplicité. Amen.