« ובן שמנת ימים ימול לכם כל זכר לדרתיכם… « 

« À l’âge de huit jours, sera circoncis tout mâle dans vos générations. » (בראשית יז, יב)

Il est écrit dans les psaumes : « Car pour Toi, nous nous sommes livrés à la mort chaque   jour.» (תהילים מד, כג). La Guémara explique ainsi le verset : « Rav Yehochoua Ben Levi dit : on parle de la mila qui a été donnée le huitième jour. »  (גיטין נז:) – Rachi commente que, parfois, le nourrisson mourait.

Une question se pose sur cet enseignement du Talmud : comment interpréter le verset : « Car pour Toi, nous nous sommes livrés à la mort chaque jour » si cela renvoie à la brit mila ?  Pourtant, la brit mila – où l’on risque notre vie – ne s’accomplit qu’une  fois et non chaque jour ?

De plus, le Rachba, pilier des Commentateurs Talmudique, s’interroge sur ce passage de la Guémara : « Est-il possible de mourir en Kidouch Hachem chaque jour ? Evidemment non. Ceci vient, en fait, nous enseigner que, lorsque nous disons dans le Chema Israël « Tu aimeras ton D.ieu… de toute ton âme » cela signifie que nous sommes d’accord « en principe » de mourir en Kidouch Hachem, par amour. De ce fait, Hakadoch Baroukh Hou nous le compte comme si nous l’avions fait « . (שו »ת ח »ה סימן נב’)

Comment convient-il donc d’interpréter les paroles de David Hamelekh ? Parle-t-on de la mila comme le mentionne la Guémara, ou bien de la lecture du Chema Israël comme le rapporte le Rachba ?

Il semble qu’un enseignement du ‘Hatam Sofer nous permet de répondre aux questions. En effet, il demande : « Comment nous est-il permis d’accomplir la mila sur un nourrisson ? Il existe pourtant un danger pour sa vie (comme l’explique Rachi : parfois le nourrisson mourait) ? Et si tu veux me dire que c’est tout de même permis car nous allons d’après la majorité des cas (des enfants qui ne meurent pas), le Talmud dit de façon explicite : « Nous n’allons pas d’après la majorité dans un cas de danger de vie et de mort. » (כתובות טז.)  C’est-à-dire que, même si le risque n’est que d’un sur mille, on ne le prend pas ».

Le ‘Hatam Sofer répond : « Nous voyons clairement de nos yeux que même un Juif sur mille ne meurt pas à cause de la mila – car la mitsva protège et sauve – même si, d’après les lois de la nature, une petite minorité est censée mourir « .[1]

Il ressort de ces paroles que, bien qu’il y ait un danger de mort en pratiquant la mila, nous n’allons pas d’après la règle générale qui veut, qu’en cas de danger, nous ne suivons pas la majorité, mais nous réalisons la mitsva de la brit mila. Cela parce que nous avons foi et nous nous appuyons sur la notion que le mérite de la mitsva protégera l’enfant – car celui qui accomplit une mitsva ne connaît pas de mauvaise chose.

D’après cette introduction, nous pouvons répondre à une célèbre question, à savoir : puisque Avraham Avinou accomplissait toutes les mitsvot avant même le Don de la Torah, comme en témoigne le Talmud : Rav dit : Avraham Avinou accomplit toute la Torah, comme il est dit : « Parce qu’Avraham écouta Ma voix, il garda Mon observance, Mes mitsvot, Mes statuts et Mes lois ». (בראשית, כו, ה – קידושין פב. – יומא כח:)

Pourquoi donc notre Patriarche n’a-t-il pas fait la brit mila, avant d’en recevoir l’ordre de Hakadoch Baroukh Hou ?

Les paroles du ‘Hatam Sofer répondent parfaitement à cette interrogation : puisqu’il y avait un danger de mort en réalisant la mila, Avraham Avinou ne pouvait pas se mettre en péril, tant qu’il n’en avait pas reçu l’ordre direct de Hachem.  Les descendants de Noa’h ont d’ailleurs été avertis sur cet interdit : « Et sur le sang de vos âmes, Je demanderai des comptes. » (בראשית, ט, ה)

Aussi, Avraham n’avait-il pas d’autre choix que d’attendre l’ordre Divin. Ceci afin d’être protégé lorsqu’il ferait la mila en tant que mitsva, puisque c’est la mitsva qui protège.

Nous devons savoir que la mitsva de mila a une très grande particularité : elle est le fondement et la racine du judaïsme. Elle permet d’implanter et d’ancrer au plus profond de chaque Juif la capacité de mourir pour sanctifier le Nom de D.ieu, chaque jour de notre vie.

La mila est la première mitsva accomplie par l’homme dans sa vie. Par ailleurs, elle comporte un risque de mort.  Or, nous avons une grande règle générale : Tout va d’après le commencement, comme l’écrit le Baal Chem Tov, dans son livre « אגרא דפרקא » : « Au moment de se lever du lit le matin, l’homme doit faire attention que sa première pensée, sa première parole, et son premier acte soit dirigé vers l’Eternel, dans la Torah et les mitsvot : ce qui entraînera alors que toutes les pensées, toutes les paroles et tous les actes de la journée seront tournés vers l’Eternel… »

Il est évident que la mitsva de mila – qui est la première mitsva réalisée dans la vie de l’homme – va influencer sur sa tendance à accomplir les commandements de D.ieu, avec abnégation, pendant toute son existence.  Dès sa naissance, est ancré dans le Juif le fait que les mitsvot doivent être réalisées et ce, même au prix de sa vie.

Comme le dit le Zohar : «la brit mila est le sceau du Roi » (תיקוני זוהר כב)inscrit dans notre chair, afin de nous souvenir que nous sommes Ses serviteurs et que nous devons accomplir nos obligations. De plus, du fait que la mila s’accompagne d’un potentiel danger de vie, cela nous donne la capacité de mourir en Kidouch Hachem. Tel le fidèle guerrier qui part au combat pour son Roi, sur le champ de bataille où il est prêt à sacrifier sa vie face aux ennemis du Roi.

Le verset des Tehilim de David est désormais beaucoup plus clair : « Car pour Toi, nous nous sommes livrés à la mort chaque jour. » (תהילים, מד, כג) – En vérité, l’explication du Rachba, mentionnant que cela renvoie à la mitsva de la lecture du Chema, est maintenant parfaitement compréhensible. En effet, les Bnei Israël se déclarent être prêts à mourir par amour pour D.ieu deux fois par jour !

Et si tu poses la question en disant : en faisant le Chéma, les Juifs se disent être prêts à mourir, mais y-a-t-il une preuve à cela ? Peut-être est-ce une simple déclaration, sans aucune intention de l’accomplir en pratique ?

La Guémara répond à ce sujet : « C’est la mila qui a été donnée le huitième jour. » (גיטין נז:) – Puisque la mila est inscrite au plus profond de l’être, elle a imprégné l’homme de la capacité à donner sa vie pour Hachem ! Alors oui, lorsque les Bnei Israël lisent le Chéma, ils le font en toute vérité et intégrité ![2]

Voici les paroles des Sages concernant la grandeur et l’importance de la mitsva de mila. Elle est fondamentale, au point qu’il est impossible à l’homme d’atteindre la sainteté de la Torah sans être circoncis, comme il est écrit au moment du don de la Torah :

 » וְעַתָּה אִם שָׁמוֹעַ תִּשְׁמְעוּ בְּקֹלִי וּשְׁמַרְתֶּם אֶת בְּרִיתִי וִהְיִיתֶם לִי סְגֻלָּה מִכָּל הָעַמִּים כִּי לִי כָּל הָאָרֶץ  »                                                   

« Et maintenant, écoutez, vous écouterez Ma voix, vous garderez Mon alliance, vous serez pour Moi un trésor parmi tous les peuples car à Moi est toute la terre. » (שמות, יט, ה)

Les dernières lettres des quatre derniers mots du verset

 » וִהְיִיתֶם לִי סְגֻלָּה מִכָּל…… »                                         

« …Vous serez pour Moi un trésor parmi tous les peuples »

forment le mot מילה = « mila« .

Le Midrach dit également :

Une fois, Akilès discuta avec l’empereur Adrien :

  • Je souhaite me convertir pour être Juif.

L’empereur répondit :

  • Chez ce peuple, tu souhaites te convertir ? Ô combien, je l’ai ridiculisé ! Ô combien, j’en ai tué ! Et toi, tu souhaites te mélanger avec eux, la bassesse des nations ? Mais qu’as-tu vu en eux pour vouloir te convertir ?

Il lui dit :

  • Le plus petit d’entre eux sait comment Hakadoch Baroukh Hou a créé le monde, ce qui fût créé le premier jour, ce qui fût créé le deuxième jour, depuis combien de temps le monde a été créé, sur quoi le monde tient et leur Torah est vérité !

L’empereur répliqua :

  • Va et apprends leur Torah, mais ne fais pas la mila » Akilès lui déclara :
  • Le plus sage de ton royaume – même s’il a cent ans – ne pourrait étudier la Torah sans la mila, ainsi qu’il est écrit : « Raconte Ses paroles à Yaacov, Ses lois et Ses statuts à Israël car il n’en a pas été fait ainsi pour tous les autres peuples… » (מדרש שמות רבה, ל, יב)

Pourquoi serait-il impossible de retenir la Torah sans la réalisation de la brit mila ?

Ce point peut être éclairci par les paroles de Reich Lakich dans la Guémara : « D’où savons-nous que les paroles de la Torah ne restent que chez celui qui se tue pour elle ? Parce qu’il est dit : Telle est la Torah d’un homme qui meurt dans une tente ». (ברכות סג:)

Pour conclure, nous voyons que la Torah ne peut s’acquérir que chez celui qui est prêt à mourir pour elle. Comme nous l’avons constaté précédemment, la mitsva de mila comporte un aspect de  » mourir pour elle « . Par ailleurs, il est dit dans le Choul’han Aroukh : « L’homme doit être particulièrement attentif à penser certaines intentions au moment de réciter le Chema ; en effet, il doit avoir l’intention d’être prêt à mourir en Kidouch Hachem ; à chaque lecture, il doit penser, dans son esprit, aux quatre sortes de peine de mort applicables par le Bet Din : la lapidation, la mort par brûlure, par l’épée, par la strangulation. En prenant sur soi les quatre peines de mort du Tribunal, cela lui est compté, comme s’il mourait de façon effective et sa lecture du Chema lui est considérée comme une renaissance.  S’il en est ainsi, heureux est-il et bonne est sa part. » (שו »ע או »ח סימן סב – ע)

 [1] En effet, celui qui accomplit une mitsva est protégé, lors de son accomplissement, contre l’ange de la mort. Voir les commentaires sur le verset : « Celui qui respecte les Commandements ne connaîtra rien de mal. » (קהלת ח, ה) Consulter également le Talmud.                              (שבת ל: – קידושין לט: ע »פ מהרש »א)

[2] Nos Maîtres de mémoire bénie nous ont enseigné que l’homme doit avoir la kavana de prendre sur lui les quatre sortes de mort du Bet Din, lorsque l’on récite le Chema. De ce fait, cela est considéré dans les mondes supérieurs, comme un repentir total et le joug de la royauté Divine ainsi que le joug des mitsvot sont acceptés pleinement et accèdent jusqu’au Trône de Gloire sans aucune obstruction.