» ואתה תצוה את בני ישראל ויקחו אליך שמן זית זך כתית למאור להעלות נר תמיד  »

« Quant à toi, tu ordonneras aux enfants d’Israël : qu’ils prennent pour toi de l’huile d’olive pure concassée pour le Luminaire, afin de faire monter la lumière perpétuellement. »(2) (שמות כז, כ)

Note : Pourquoi notre section débute-t-elle par « tu ordonneras » et non par l’expression habituelle : « l’Eternel parla à Moché en disant » ? L’Ecriture vient faire une louange à Moché Rabbénou car le Maître du monde lui a transmis ici le sceptre de la royauté et donc le pouvoir d’ordonner. Car seul le roi qui a été nommé par le Maître du monde a la possibilité d’ordonner aux enfants d’Israël.

À propos de notre verset, les Sages d’Israël demandent : pourquoi Hakadoch Baroukh Hou a-t-il choisi précisément de l’huile d’olive pour alimenter cette lumière perpétuelle dans le Temple ?

Commençons par introduire les paroles du ‘Hatam Sofer qui explique, au nom du Ari Zal, que Moché Rabbénou était la réincarnation de Noa’h et de Chet, comme nous en trouvons une allusion dans l’Ecriture, dans le dernier mot de la paracha précédente Térouma : נחשת qui signifie littéralement cuivre mais qui peut-etre lu comme suit : Noa’h et Chet = « נח – שת » et le premier mot de notre paracha : ואתה= et toi. Ces deux termes juxtaposés signifient : ואתה נח-שת = Noa’h et Chet, et toi = Toi, Moché tu es le guilgoul de Noa’h et Chet. (3) (שער הפסוקים בראשית)

(3) Le Zohar Hakadoch demande pour quelle raison a-t-on appelé l’embarcation de Noa’h « une arche » et non un bateau ? Il faut répondre que dans le mot arche = « תיבה » nous retrouvons les termes la maison de D.ieu = « בית – ה' » – car la spécificité de l’Arche était que D.ieu avait donné des injonctions très précises concernant ses mesures, comme la largeur, la longueur ou encore la hauteur. Or, à chaque fois que l’on trouve des mesures précises dans l’Ecriture comme pour l’Arche, il s’agit de la maison de Dieu, comme il est dit à propos du Sanctuaire et de ses ustensiles.

Pourquoi l’Ecriture fait-elle allusion à cette triple réincarnation : Noa’h, Chet et Moché précisément lorsqu’est évoqué le service de l’allumage de la Ménorah du Temple ? De plus, quel est le lien entre la réincarnation de Noa’h et de Chet en Moché, avec la suite de notre verset : « Tu ordonneras aux enfants d’Israël : qu’ils prennent pour toi de l’huile d’olive pure concassée pour le Luminaire ?

Pour répondre à nos questions, commençons par rapporter les paroles des Sages du Midrach sur notre verset : « Quant à toi, tu ordonneras » – c’est le sens de ce qui figure dans les écrits du prophète Jérémie : « D.ieu t’avait nommé : olivier verdoyant, remarquable par la beauté de son fruit » (ירמיה יא, טז) Le peuple d’Israël est-il seulement comparé à l’olivier ? Israël fut comparé à de nombreux autres arbres prestigieux comme la vigne, le figuier, le dattier, le cèdre, le noyer… Pourquoi le prophète Jérémie a-t-il comparé le peuple d’Israël précisément à un « olivier verdoyant, remarquable par la beauté de son fruit » ?

Le Midrach apporte une première explication : avant que l’olive n’apparaisse sur l’arbre, elle passe par l’étape de petites graines et évolue jusqu’à devenir une olive consommable. Puis, les branches de l’olivier sont coupées et frappées afin qu’elles libèrent leurs fruits. Ensuite, les olives sont rassemblées dans une grange et versées dans un pressoir. Elles seront pressées jusqu’à obtention de la précieuse huile. Le juif ressemble à cette olive dans le sens où il passe par de nombreuses étapes dans sa vie, de nombreuses épreuves, souffrances et oppressions avant de se repentir, de se tourner vers son Créateur et donner le meilleur de lui-même comme cette olive.

Le Midrach en apporte une seconde : tous les liquides se mélangent les uns avec les autres et se confondent, sauf l’huile qui ne se mélange pas mais se maintient dans sa concentration. Il en est de même pour le peuple d’Israël qui ne se mélange pas avec les nations, comme il est dit : « Tu ne te marieras pas avec eux » (דברים ז, ג) De plus, même lorsque l’huile est mélangée avec d’autres liquides, elle retrouve toujours sa place au-dessus des autres liquides. Ainsi, lorsque le peuple juif accomplit la volonté du Créateur, il se retrouve toujours au-dessus des nations, comme il est dit : « l’Eternel ton D.ieu te placera en position supérieure au-dessus de tous les peuples de la terre » (שמות רבה לו, א דברים כח, א)

Le « ישמח ישראל » nous explique que chaque juif a la possibilité de choisir le chemin qu’il va emprunter pour tracer sa destinée : va-t-il se distinguer des autres nations en s’écartant de leur façon de vivre, et être ainsi comparé à l’huile d’olive qui se distingue naturellement des autres liquides ?

Ainsi s’exprime le roi David : « Tandis que moi, je suis comme un olivier verdoyant, dans la maison de D.ieu, jamais, à jamais ma confiance dans la bonté de D.ieu. » (תהילים נב, י) Le roi David poursuit : je me compare à « un olivier verdoyant » puisque je suis installé « dans la maison de D.ieu » c’est-à-dire les synagogues et les maisons d’études qui sont à l’écart de toutes les nations du monde, et c’est la seule façon de se protéger de leur oppression.

Ou au contraire, que D.ieu nous en préserve, choisira-t-il de se mélanger aux peuples du monde et adopter leur mode de vie ? Il est clair que dans ce cas-là, les nations viendront tôt ou tard l’oppresser comme une olive que l’on amène au pressoir.

Dans sa grande miséricorde et sa large bonté, Hakadoch Baroukh Hou souhaite ardemment que le peuple juif soit séparé des nations, comme l’huile qui se distingue naturellement des autres liquides, sans avoir à subir l’oppression des nations. Et c’est le sens de notre verset : « Quant à toi, tu ordonneras aux enfants d’Israël : qu’ils prennent pour toi de l’huile d’olive pure » : quant à toi Moché, ordonne aux enfants d’Israël de choisir d’être comparé à l’huile d’olive afin qu’ils puissent mériter de symboliser la suite du verset : « pour faire monter la lumière perpétuellement » ils s’élèveront au-dessus des nations, comme l’huile s’élève au-dessus de tous les liquides, sans subir aucun exil ni aucune oppression.

Moché grandit dans le palais de Pharaon, au milieu des influences des nations sans jamais se mélanger avec les égyptiens. C’est pourquoi il fut précisément choisi par le Maître du monde pour ordonner aux enfants d’Israël « qu’ils prennent… de l’huile d’olive pure » Le Créateur souhaitait que le peuple d’Israël apprenne de Moché et puisse être comme de l’huile qui ne se mélange pas aux autres liquides.

Comme le Ari Zal nous l’a enseigné, Moché était la réincarnation de Noa’h et de Chet et devait réparer leurs âmes. Quels furent les dommages engendrés par Noa’h et Chet nécessitant une réincarnation en Moché Rabbénou ?

Le Ari Zal explique que bien que Noa’h était juste et intègre, son service divin comportait un certain défaut : celui de ne pas avoir prié et demandé miséricorde pour l’humanité dans sa génération, celle du Déluge. N’ayant pas prié pour eux, ils ne purent être sauvés et le Déluge fut associé à son nom, comme l’exprime le Créateur à travers la bouche du prophète Isaïe : « Je ferai en cela comme les eaux de Noa’h : de même que J’ai juré que le Déluge de Noa’h ne déshonorait plus la terre, ainsi Je jure de ne plus M’irriter… » (ישעיהו נד, ט) C’est pour réparer ce dommage que Noa’h fut réincarné en Moché Rabbénou.

C’est le sens des paroles de Moché Rabbénou à l’Eternel après la faute du veau d’or :

« ועתה אם תשא חטאתם ואם אין מחני נא מספרך אשר כתבת »

« Et maintenant si tu supportes leur faute… et sinon, efface-moi de Ton livre que Tu as écrit » (שמות לב, לב) Moché Rabbénou était prêt à mourir pour épargner le peuple juif et supplia l’Eternel de pardonner à Ses enfants sinon « efface-moi de Ton livre ». (שם) C’est ainsi qu’il répara le dommage de Noa’h qui n’avait pas prié pour sa génération.

Le Ari Zal ajoute que dans le mot « מחני » = « efface-moi » nous retrouvons les mêmes lettres qui composent les mots « מי נח » = « les eaux de Noa’h » (ליקוטי תורה כי תשא)

Il ressort des paroles du Ari Zal que lorsque Moché dit au Maître du monde « מחני » = « efface-moi », il insinuait qu’il avait réparé « מי נח » = « les eaux de Noa’h » – en priant de toutes ses forces pour sauver sa génération et ainsi rectifier le dommage qui avait été causé par Noa’h. (4)

Note : Nous pouvons également remarquer que l’expression du verset « מחני נא » = « efface-moi je t’en prie » on peut y retrouver les mêmes lettres que « מנח אני » = « je viens de Noa’h »

Lorsque l’Eternel déclara : « A présent laisse-Moi, que Ma colère s’enflamme contre eux et que Je les extermine tandis que Je ferai de toi un grand peuple » (שמות לב, י) Il voulut mettre Moché Rabbénou à l’épreuve : acceptera-t-il que le peuple juif soit anéanti, comme ce fut le cas à l’époque de Noa’h, ou sera-t-il prêt à risquer sa vie pour sauver les enfants d’Israël et les préserver de l’extermination causée par la faute du veau d’or ?

Moché Rabbénou supplia l’Eternel d’éveiller Sa miséricorde sur Ses enfants, comme il est écrit : « Moché implora la face de l’Eternel » (שמות לב, יא) – « Je t’en prie, pardonne la faute de ce peuple » (במדבר יד, יט) Hakadoch Baroukh Hou fut alors apaisé par la prière de Moché et lui répondit : « J’ai pardonné selon tes paroles » (במדבר יד, כ) C’est ainsi que Moché répara l’âme de Noa’h qui avait été détériorée pour ne pas avoir prié pour l’humanité. (5)

Note : Lorsque la colombe apporta une branche d’olivier à Noa’h pour lui signifier que sa mission dans l’Arche touchait à sa fin. Moché Rabbénou reprit la réparation du monde là où Noa’h l’avait laissée en allumant la Ménorah avec de l’huile d’olive pure afin de faire monter la lumière perpétuellement.

Le Zohar Hakadoch nous explique que lorsque Noa’h sortit de l’Arche après l’année du Déluge, il ne reconnut pas la terre qu’il avait quittée un an auparavant. Il se retrouva sur une terre où régnait la désolation. Il se mit à pleurer : « Maître du monde, tu es appelé « compatissant ». Tu aurais dû avoir pitié de Tes créatures ! Le Créateur lui répondit : Berger insensé ! Est-ce le moment de parler ? Avant le Déluge, Je t’ai prévenu que J’allais exterminer l’humanité et tu aurais dû demander pitié pour elle. Mais lorsque tu as appris que tu serais épargné, tu as négligé de Me supplier en faveur des autres hommes. Comment oses-tu ouvrir ta bouche devant Moi à présent ? » (זוהר ח »א, רנד)

Il nous reste à savoir quel était le dommage causé par Chet qui nécessita une réincarnation en Moché Rabbénou ?

Il est écrit dans le livre « ספר הדורות » que Chet avait ordonné à ses enfants de ne jamais se marier avec la descendance de Caïn. Ce qu’ont respecté les descendants de Chet jusqu’à la septième génération. Puis ils s’unirent avec la descendance de Caïn et engendrèrent des géants qui se pervertirent dans la faute jusqu’à leur mort durant le Déluge. Cependant, bien que Chet fut un grand tsadik qui prévint sa descendance de ne pas se marier avec celle de Caïn, il endossa la faute de ses descendants qui outrepassèrent son injonction. Cette faute nécessita une réparation. (ספר הדורות דף קל)

Pour réparer les deux dommages causés par Noa’h et par Chet, la Torah fait allusion au fait que leur réparation devra être effectuée par Moché Rabbénou qui avertira le peuple juif en disant : « Quant à toi, tu ordonneras aux enfants d’Israël : qu’ils prennent pour toi de l’huile d’olive pure » – qu’ils apprennent de toi le symbole de huile d’olive qui se distingue de tous les autres liquides et c’est par cet intermédiaire que tu mériteras de « faire monter la lumière perpétuellement » – c’est-à-dire d’élever les âmes de Noa’h et de Chet qui seront réparées et qui sont comparées à une bougie, car la néchama est comparée à la bougie de l’Eternel.

Il faut ajouter que le mot huile = שמן est composé de trois lettres qui sont les initiales de Chet, Moché et Noa’h :

Chet = שת

Moché = משה

Noa’h = נח

Cette allusion nous faire comprendre que Noa’h et Chet parvinrent à une réparation complète à travers Moché Rabbénou, symbole de l’huile d’olive, qui avertit Israël de toujours se maintenir à l’écart des nations, comme l’huile qui se sépare naturellement des autres liquides.