Rabbi Yossef ‘Haïm, le Maître de Bagdad (1834 - 1909), plus connu sous le nom de Ben Ich ‘Haï du nom de son livre, nous rapporte, la question posée dans le Saint Zohar:

Pourquoi le Saint bénit soit-Il a fait descendre le Peuple d’Israël en Galout en Égypte et pourquoi ne les a t-il pas fait entrer directement en Erets Israël, ce qui en fait était l’ultime but. Le Ben Ich ‘Haï répond par une allégorie.

Il était une fois un homme riche qui se maria avec une jeune femme mais n’eut pas d’enfant. Un jour qu’ils se promenaient tout deux dans la ville, ils rencontrèrent un enfant pauvre et affamé, cherchant quoi se mettre sous la dent.

Le riche dit à sa femme :
– Nous n’avons pas d’enfant, que penses-tu de prendre cet enfant chez nous et de l’adopter?

La femme lui répondit que l’idée était bonne. Le riche s’adressa à l’enfant :
– D’où viens-tu et où est ta maison?

L’enfant répondit :
– Je n’ai pas de maison, mes parents m’ont abandonné et je vis dans les marchés et la rue.
– Viens chez nous, ce sera ta maison.

L’enfant se réjouit beaucoup et accepta la proposition. Arrivés chez eux ils le lavèrent et le restaurèrent. Puis allèrent dans un magasin pour enfants et lui achetèrent des costumes luxueux comme le voulait leur rang social. Ils habillèrent l’enfant qui leur montra reconnaissance.

Mais voici qu’un jour, après plusieurs années, quand l’enfant était devenu un jeune homme, ils virent sous leur fenêtres un pauvre chantant de belles chansons en attendant qu’on lui lance quelques pièces de monnaie.

Le riche lui envoya une grosse somme d’argent et le pauvre ne s’arrêta pas de remercier et se mit à chanter de plus belle.

La femme dit à son mari :
– Tu vois, lui au moins est reconnaissant tandis que le jeune homme qui est chez nous depuis déjà plusieurs années, nourri et blanchi par nos soins, ne nous a jamais adressé le moindre signe de remerciement, tandis que ce pauvre ne sais plus comment nous montrer sa gratitude pour les quelques pièces que nous lui avons jetées.

Le riche dit à sa femme:
– Laisse-moi lui donner une petite leçon.

Il alla voir le jeune homme et lui dit, tu sais le grand service que nous t’avons rendu en t’adoptant, mais maintenant tu es assez grand pour te débrouiller tout seul. Emballe tes affaires et trouve-toi un autre endroit pour vivre. Bien sûr je te donnerai une somme d’argent suffisante jusqu’à ce que tu puisses subvenir à tes besoins.

Voici donc le jeune livré à lui même, lui qui fut élevé dans du coton depuis quelques années, ne sut pas s’assumer, et retrouva les repères qu’il avait auparavant, mais ne sachant plus comment trouver sa nourriture ni comment entretenir proprement ses habits. Il avait la pauvreté en son âme et retrouva très vite sa véritable nature.

Voici qu’au bout d’un mois le riche vint chercher le jeune homme et le retrouva vivant dans la rue, affamé, sale, et avec les vêtements tout déchirés. Il lui dit:
– J’ai décidé de te reprendre à la maison comme avant.

L’enfant se réjouit beaucoup et n’arrêta pas de remercier et tarir le riche d’éloges pour sa bonté et sa générosité.

L’homme dit à sa femme:
– Du fait que cet enfant a été habitué dès son jeune âge à être gâté, il n’a pas su qu’il fallait être reconnaissant. Croyant que tout était naturel, il ne s’est pas senti redevable.

Pour en revenir à notre sujet, si les enfants d’Israël étaient revenus directement en terre promise, ils n’auraient pas su reconnaitre la grandeur du tout puissant pour sa bonté. Ainsi ils ont été esclaves sur une terre ne leur appartenant pas et sans identité. Quand ils sont sortis, ils ont vu l’importance de la liberté. Ils ont erré pendant 40 ans dans le désert, et quand ils sont entrés en Israël ils ont su apprécier la beauté de leur pays et la chance qu’ils avaient.

Nous aussi, du fait que nous sommes habitués à l’abondance que nous donne HaChem, nous ne sommes pas assez reconnaissants pour tous les bienfaits qu’il nous prodigue chaque jour. Nous devons donc souvent nous imaginer, qu’à D.ieu ne plaise, sans argent, sans maison, sans enfants, etc.

Nous saurons alors être reconnaissants pour chaque petite chose que nous recevons à chaque instant, non seulement d’HaChem pour qu’il continue à nous donner, mais aussi de nos proches, si un sourire, une petite attention, ou n’importe quel service.

Rav Its’hak Meïr ben ’Haïm
Un élève du Kollel Beth Chelomo